DILLENBOURG, P., BAKER, M., BLAYE, A. & O'MALLEY, C. (1996) The evolution of research on collaborative learning. In E. Spada & P. Reinman (Eds) Learning in Humans and Machine : Towards an interdisciplinary learning science. (pp. 189-211). Oxford : Elsevier.

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Au début de la recherche sur l'apprentissage collaboratif (dans les années 1970-1980), on essayait surtout de comprendre comment l'individu fonctionnait dans le groupe. On pensait alors, en psychologie cognitive comme en intelligence artificielle, que la cognition était le résultat d'un processus strictement individuel. L'aspect social était laissé en arrière plan (le contexte). Aujourd'hui, la recherche prend comme unité d'étude non plus l'individu, mais le groupe et les interactions sociales qui en découlent. Nous verrons enfin dans l'article qu'on utilise aujourd'hui l'ordinateur pour observer ces interactions et la linguistique pour les analyser. Mais tout d'abord, commençons par décrire brièvement trois courants théoriques qui ont travaillé sur l'apprentissage collaboratif.

Les courants théoriques

Suivant que l'on considère dans la collaboration (en pairs), deux systèmes cognitifs qui échangent des informations (travail sur l'individu) ou un seul système avec ses propriétés (travail sur le groupe), il est possible de classer les différentes approches sur l'axe ci-dessous :

Individus - socio-constructivisme- socio-culturalisme - cognition située - groupe

Dans le socio-constructivisme (Piaget), les chercheurs observent comment les interactions sociales affectent le développement cognitif d'un individu ? Les concepts de conflits et de coordination de points de vue y sont développés.

Dans le socio-culturalisme (Vygotsky), on observe la relation causale entre les interactions sociales et le changement cognitif d'un individu. Les processus mis évidence sont l'appropriation, la régulation et la zone proximale de développement.

Enfin dans la cognition située, les chercheurs considèrent l'environnement comme une partie intégrante de l'activité cognitive. C'est seulement dans cette dernière approche que l'unité d'observation est le groupe et non plus l'individu.

Les paradigmes

La recherche a donc évoluée et il est possible aujourd'hui de mettre en évidence trois paradigmes qui correspondent à trois générations de recherches.

The " effect " paradigm : une première génération d'études a tenté de répondre à la question suivante : Est-ce mieux d'apprendre en groupe qu'apprendre tout seul ? Les travaux ont essentiellement porté sur la mesure de performances.

The " condition " paradigm : plus tard, la question a été de savoir sous quelles conditions l'apprentissage collaboratif est-il efficace. On tente alors de contrôler les variables comme la composition du groupe (taille, genre, hétérogénéité), les caractéristiques de la tâche (acquisition d'aptitudes, planification, catégorisation, mémorisation, etc.), le contexte de collaboration et le médium de communication.

The " interaction " paradigm : entre les différentes variables, il y a inévitablement des interactions qu'il est difficile d'isoler. On décide alors de ne plus travailler sur la collaboration au sens large, mais d'introduire des variables intermédiaires susceptibles d'être observées (l'explication et le contrôle). La question précédante se divise en deux : quelles interactions ont cours sous quelles conditions ? et quels effets ont ces interactions ?

L'ordinateur pour observer les interactions

l'ordinateur permet d'exercer un contrôle total sur certain aspects de la collaboration (échange de paroles, distribution des tâches, etc.). Voici quelques exemples de tâches médiatisées par l'ordinateur

Pendant longtemps, on pensait que l'avantage des ordinateurs étaient d'individualiser les tâches et d'isoler les élèves. La réalité économique a bien montrer que même chez nous, cela demeurait une utopie. Donc on a dû faire travailler les enfants en groupe devant le même ordinateur. Cela a créé une situation d'apprentissage collaboratif assez intéressante (interaction homme - machine et homme - homme). Suivant les interfaces, on peut bien partager les tâches, utiliser les feed-back immédiats pour provoquer les interactions entre les pairs, etc.

L'ordinateur permet également d'intégrer différents types de communication synchrones et asynchrones (pas seulement textuelle (qui permet néanmoins de laisser le temps de la réflexion), mais également audiovisuelle.

Apprendre avec des systèmes experts ou des environnements d'apprentissage.

La linguistique pour analyser les interactions

Si les progrès cognitifs de l'individu sont corrélés avec certaines interactions de la collaboration, il faut donc maintenant aller plus loin dans l'analyse de ces interactions. Quels types d'interactions peuvent vraiment induire de la collaboration ? La linguistique montre qu'il y a deux types d'interaction qui accompagnent la collaboration : la négociation et l'argumentation.

Les auteurs distinguent trois types de négociation : l'ajustement mutuel (co-construction de la solution du problème) - l'argumentation compétitive (exploration de différentes alternatives opposées) - l'utilisation de l'autre pair comme ressource. D'autre part, la négociation peut également porter sur le sens, sur la signification des concepts, car il est important d'avoir une compréhension partagée du problème pour pouvoir collaborer.

En conclusion, les auteurs de l'article préconisent d'arrêter d'utiliser le terme de collaboration au sens large et de commencer à voir ce qui dans la collaboration est vraiment efficace, comme la négociation. Il porte également attention à la grande part de communication non verbal dans la collaboration qui exerce à coup sûr une certaine influence dans l'apprentissage.


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