Tests de Cointégration

L'investigation récente a appliqué de nouveaux tests pour tester l'hypothèse de l'efficience du marché des changes à terme, les tests de cointégration.

On part du fait que l'évidence empirique suggère que pendant la période du système des taux de change flottant, les taux de change se sont comportés comme des séries non stationnaires, plus précisément, des séries intégrées d'ordre 1.

Les variables intégrées constituent un cas particulier des variables non stationnaires. Une variable est intégrée d'ordre 1 (noté ~ I(1)) si l'accroissement est stationnaire (ou intégrée d'ordre zéro: ~ I(0)). On peut dire aussi que est intégré d'ordre 1 ou a une racine unitaire si: , où est une erreur stationnaire. Un cas particulier très important est le cas où est bruit blanc car la série suit un processus marche au hasard.

Cette caractéristique des variables génère un problème au moment de tester l'efficience:

i) Si les variables expliquée et explicative sont intégrées d'ordre 1, une combinaison linéaire des variables (, le résidu) est généralement aussi intégrée d'ordre 1.

Dans ce cas, d'une part, la relation n'a pas de sens car les deux variables tendront à s'éloigner de façon persistante l'une de l'autre et on ne pourra pas considérer comme une prévision de .

D'autre part, Phillips (1986) a démontré que dans le cas de résidus non stationnaires, les techniques usuelles d'estimation et de test ne peuvent pas être utilisées car on obtient des résultats et interprétations qui ne sont pas valables.

ii) Mais si la variable explicative et la variable expliquée sont toutes les deux intégrées d'ordre 1 et qu'une combinaison linéaire de ces deux variables (le résidu) est intégrée d'ordre zéro (à savoir stationnaire) alors on dira que ces deux variables sont cointégrées d'ordre (1,1).

Dans cette situation, d'un côté, si , la relation est considérée comme une relation d'équilibre à long terme et si , la déviation est considérée comme une erreur d'équilibre transitoire. On peut donc considérer l'équation comme une relation d'équilibre, et alors peut être considérée comme une prévision de .

De plus, on a démontré que dans le cas de cointégration, les estimateurs sont "super-convergents" (les estimateurs convergent aux vraies valeurs des paramètres à une plus grande vitesse, c'est-à-dire avec une taille d'échantillon plus petite.), mais qu'ils n'ont pas une distribution asymptotique normale, raison pour laquelle les tests statistiques usuels ne peuvent pas être utilisés.

Ainsi en prenant en considération les remarques présentées ci-dessus, on peut affirmer que pour que la relation ait un sens au moment d'appliquer la régression, il faut que les variables et soient des variables cointégrées. Cependant, il faut remarquer que l'existence de la cointégration est une condition nécessaire mais non suffisante pour que la double hypothèse soit vérifiée car:

i) Premièrement, l'existence de cointégration est compatible avec plusieurs paires de valeurs des coefficients a et b. Pour vérifier cette double hypothèse on devrait ensuite tester si a=0 et b=1.

ii) Deuxièmement, la vérification de la double hypothèse nécessite que les résidus soient des bruits blancs; or l'existence de cointégration implique seulement que les résidus sont stationnaires. On devrait donc tester si les résidus sont des bruits blancs.

Parmi la littérature sur l'application des tests de cointégration on peut citer Hakkio et Rush (1989), Baillie et Bollerslev(1989) et Jung et Wieland (1990).

Hakkio et Rush en utilisant des données mensuelles de juillet 75 à octobre 86 sur le mark allemand et la livre sterling, appliquent sept tests de cointégration et rejettent l'hypothèse jointe (d'anticipations rationnelles et neutralité au risque), mais ils ne peuvent pas déterminer quel facteur est la cause du rejet.

Pour la période 1980-1985, Baillie et Bollerslev, en utilisant des données journalières de sept taux de change au comptant et de change à terme (1 mois) par rapport au dollar, appliquent des techniques d'analyse de séries temporelles: les tests de racine unitaire pour tester la stationnarité des variables et les tests de cointégration pour tester l'existence des relations d'équilibre (ils appliquent les tests de cointégration de Phillips et Perron). En appliquant les tests de Phillips et Perron ils aboutissent à la conclusion que les sept paires de séries sont cointégrés, ce qui est une condition nécessaire (mais non suffisante) pour que l'hypothèse jointe (d'anticipations rationnelles et neutralité au risque) soit vérifiée.

Jung et Wieland (1990) examinent l'hypothèse d'efficience du marché des changes à terme pour six monnaies vis-à-vis du mark allemand en utilisant des données mensuelles (moyennes) des taux de change au comptant et des taux de change à terme à 3 mois. Ils appliquent le test de Dickey-Fuller augmenté et le test DWRC et aboutissent à la conclusion qu'il y a cointégration pour les six taux de change. Ils considèrent que la vérification de cette condition nécessaire implique que les agents économiques anticipent correctement la direction des variations de taux de change, cependant on ne peut pas exclure la possibilité de l'existence de profits spéculatifs du fait que les coefficients a et b ne sont pas restreints à être égaux à zéro et l'unité respectivement, et que le résidu n'est pas restreint à être un bruit blanc.