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Introduction
L'EIAO a pour but de développer des tutoriels intelligents qui
visent à l'acquisition de schémas. Il tente en fait de recréer
avec l'ordinateur la relation enseignant-enseigné. De ce fait, un
dispositif EIAO, pour être efficace, se devrait de maîtriser:
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le modèle du domaine (l'ordinateur doit être un expert du
domaine enseigné. On parle aussi du module de l'expert)
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le modèle de l'élève ("construction d'un portrait
des connaissances de l'élève qui s'enrichit à chaque
étape de l'apprentissage"([1], p.3)
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le modèle pédagogique (choisir une méthode ou une
stratégie d'apprentissage en fonction du domaine à enseigner.
En général, un tutoriel intelligent choisit une voie "qui
permet à l'élève d'explorer ses propres solutions
tout en étant capable de lui fournir une aide lorsqu'il est "perdu",
qu'il tourne en rond ou que ses erreurs ne lui apportent plus d'informations
pertinentes" ([1], p.6 )
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l'interface (dialogue en langage naturel, etc.)
Mais, lorsqu'un dispositif EIAO est développé, il est très
difficile d'être performant sur ces quatre axes en même temps
pour des raisons de temps et de coût. Aussi, dans le développement
d'un dispositif EIAO, c'est souvent un des axes qui est privilégié.
Dans le cas de WEST, l'accent a été mis sur le modèle
pédagogique, avec l'idée du coach.
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Présentation du dispositif
WEST est un système EIAO qui permet d'entraîner et d'améliorer
les compétences arithmétiques de l'élève. Il
se présente comme un jeu de l'oie. Il comporte 70 cases. Les cases
10, 20, 30 ,40 50, 60 et 70 sont des villes (towns). Pour gagner,
l'élève, qui se bat contre l'ordinateur, doit terminer le
premier la conquête de l'ouest.
Les règles sont les suivantes :
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Sur certaines cases il peut emprunter des raccourcis (la case 5 l'amène
à la case 17, la 25 à la case 36, la 44 à la case
54).
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Si un joueur arrive sur une case autre qu'une ville et qui est déjà
occupée par son adversaire, les 2 concurrents inversent leur place.
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Le nombre de points n'est pas obtenu avec des dés. A chaque
tour, le joueur obtient trois nombres entiers déterminés
aléatoirement par trois "roues" différentes : la première
va de 1 à 3, la seconde de 0 à 4 et la dernière de
1 à 7. Avec les entiers obtenus, il doit composer une expression
arithmétique qui contient au moins deux opérateurs différents.
Le résultat obtenu lui indique de combien il peut avancer sur le
jeu.
L'intérêt du jeu est que la statégie la meilleure n'est
pas forcément de faire un maximum de points. Il est parfois
plus intéressant de pouvoir inverser les places des deux joueurs.
L'élève est donc invité à explorer une large
palette d'expressions algébriques pour jouer de manière optimale.
Apprendre en jouant est très motivant pour un élève
mais cela ne suffit pas à le faire progresser. Ainsi, dans le jeu
qui nous intéresse, un élève a tendance à répéter
toujours les mêmes expression algébriques. Il arrive ainsi
à un "palier" de connaissance qu'il ne peut dépasser seul.
Pour l'aider à progresser, Burton et Brown ont développé
l'idée du coach. Au contraire d'un tuteur qui entretient
un véritable dialogue avec l'apprenant, le coach n'intervient
que si cela est nécessaire, si ses remarques peuvent permettre à
l'étudiant de s'améliorer, de voir de nouvelles possibilités
d'expressions arithmétiques.
Comme dans LOGO, il est plus important ici d'aider l'élève
à développer et à corriger ses propres théories
que de lui enseigner les théories "correctes". Les "mauvais coups"
de l'élève doivent donc être des expériences
qui lui permettent de s'améliorer. En ce sens, le travail du coach
est subtil : ces interventions doivent être efficaces pour
prévenir l'apparition des paliers de compétences mais elles
ne doivent pas détruire la motivation de l'élève,
l'intérêt qu'il porte à l'activité. Ainsi
le problème de répondre à l'élève correctement
est remplacé par celui de l'nterrompre au bon moment avec le bon
commentaire. De plus, durant tout le jeu, l'élève a toujours
un entier contrôle de ce qu'il fait, ce qui n'est pas toujours le
cas dans d'autres dispositifs d'EIAO.
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Le rôle du coach (le module expert)
Burton et Brown ont proposé un paradigme général
pour les dispositifs informatiques basé sur l'intervention d'un
coach qu'ils appellent issues and examples et dont le but
est de rendre les interventions du coach pertientes et mémorables.
Pratiquement, le comportement de l'étudiant est analysé
et enregistré en relation avec les choix de l'expert dans les mêmes
circonstances. Comme le jeu est aléatoire, il est impossible de
prédire quelle expression algébrique sera la meilleure au
prochain coup. La maîtrise de l'étudiant sur les différents
possibilités d'expressions algébriques ne peut donc être
déterminées par rapport au nombre de fois qu'il les a employées
précédemment mais uniquement en comparaison avec les décisions
de l'expert pour les mêmes mouvements.
Lorsque c'est au tour de l'étudiant de jouer, l'expert génère
une liste de tous les mouvementss possibles. Si l'expression choisie par
l'élève n'a pas le même "rendemement" que celle choisie
par l'expert, le processus de diagnostique commence:
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Le mouvement de l'élève est analysé par un "reconnaisseur
d'expressions" pour déterminer quelle expression a été
utilisée.
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Tous les coups de l'expert qui sont meilleurs que celui de l'élève
sont aussi analysés par les mêmes "reconnaisseurs" pour produire
une liste d'expressions que l'élève n'a pas pensé
à appliqué.
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Ces expressions sont ensuite évaluées dans le modèle
de l'élève afin d'en trouver une pour laquelle l'élève
est reconnu pour être faible. Si une telle expression est trouvée,
elle est présentée à l'étudiant de manière
abstraite en utilisant un texte préenregistré et concrètement
en employant le mouvement de l'expert comme un exemple de meilleure déplacement.
De ce fait, l'élève perçoit que l'expression qu'il
n'emploie pas ou mal est importante pour pouvoir gagner. Il l'enregistrera
donc plus volontiers.
Exemple d'un dialogue dans le dispositif WEST ([2], p.141)
Bob is at 54 -- the COMPUTER is at 40.
West: It's MY turn ... Spinners are 2 4 2 My expression is : 2+(4/2)
wich gives ME 4.
I took a SHORTCUT
I bumped YOU
the COMPUTER is at 54 -- Bob is at 40.
West: It's YOUR turn ... Spinners are : 1 2 2 What arithmetic expression
did you form ?
Bob : 1+2*2
West: What number does that give you?
Bob: 5
West: You don't seem to be bumping very much. Bunps are hard to
get but they are usually a good idea.
One good example would be the expression : (1*2)+2, which would
give you a SHORTCUT and a BUMP!! So you could have been at 54 while I would
have ended up at 40. Bob is at 45 -- the COMPUTER is at 54.
...
Si l'étudiant est faible dans plusieurs formulations algébriques,
un ordre est imposé selon certains critères qui peuvent par
exemple représenter des stratégies pédagogiques (accentuation
sur un point, etc.)
Dans le modèle de l'élève est enregistré
le nombre de fois qu'une expression a été employée,
si les parenthèses sont employées correctement, etc. (cf.
[2], p.131). Mais, on parle également de stratégies. En effet,
l'expert a besoin d'une stratégie globale pour pouvoir déterminer
l'ordre d'intérêt des différentes expressions. En général,
la stratégie de base est de maximiser la distance entre les deux
joueurs. Dans certains cas, l'élève suit une autre stratégie.L'expert
peut le supposer lorsque l'élève emploie systématiquement
différentes expressions qui ne sont pas optimales pour l'expert
sans montrer de faiblesses évidentes. Si elle est efficace, Burton
et Brown pense que l'expert doit l'adopter sinon, il se doit de corriger
l'élève. Dans le cas de WEST, comme le domaine est limité,
toutes les stratégies peuvent être exhaustivement testées
et listées. Ainsi, il est possible de voir si l'une d'entre elles
n'explique pas les choix de l'étudiant.
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Les principes pédagogiques de WEST
Burton et Brown ont introduits dans leur système une douzaine
de principes pédagogiques (cette liste n'est pas exhaustive) qui
doivent permettre au coach d'avoir une intervention qui soit le
plus motivante possible dans la perspective de l'apprenant. En voici les
principaux :
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Avant de donner un conseil, être sûr que l'expression est bien
une pour laquelle l'étudiant a des difficultés
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Si un étudiant est en train de perdre, l'interrompre et lui donner
des conseils uniquement sur des mouvements qui peuvent l'éloigner
de la défaite.
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Ne pas donner des conseils pour deux mouvements consécutifs.
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L'ordinateur doit toujours jouer de manière optimale.
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Si l'élève demande de l'aide, il faut avoir des niveaux de
conseils :
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isoler une de ses faiblesses et lui en parler immédiatement
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délimiter l'ensemble des mouvements possibles à cet instant
du jeu
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sélectionner le mouvement optimal et expliquer à l'élève
les raisons de ce choix
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décrire comment obtenir avec une expression le mouvement optimal.
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Désavantages et avantages de ce dispositif
Ce qu'il faut dire immédiatement c'est que ce dispositif
est toujours resté une expérience de laboratiore. En effet,
à l'époque, la machine sur laquelle il avait été
développé coûtait trop cher. C'est d'ailleurs un des
problèmes de l'EIAO : les modèles construits sont toujours
grands et complexes d'un point de vue informatique. Leur développement
est long, nécessite des budgets importants pour des résultats
qui ne sont pas toujours satisfaisants..
WEST montre aussi une deuxième faiblesse des dispositifs d'EIAO.
Wengers [2] le souligne d'ailleurs dans son article, c'est celle du modèle
de l'élève. Il n'est jamais certain que les faiblesses diagnostiquées
d'un élève en soient vraiment. En effet, WEST suppose que
le comportement de l'élève est complètement rationnel.
Or, bien souvent des erreurs, des oublis sont plus des fautes de distraction
que d'incompréhension. Quelquefois aussi, l'élève
fait n'importe quoi juste par plaisir... Ainsi, le modèle
de l'élève est en quelque sorte biaisé. C'est d'ailleurs
pour cette raison que le coach s'exprime que s'il est sûr
d'avoir pu relever une difficulté chez l'élève.
Un autre problème de WEST est que le coach n'a aucun moyen
de contrôle sur l'environnement. Aisni, dans certains cas, s'il pouvait
décider sur quels nombres les différentes roues s'arrêtent,
cela lui permettrait de montrer le bon exemple au bon moment. (par exemple
: le coach veut sensibiliser l'élève au fait qu'il ne prend
jamais de raccourci. S'il lui faut deux pour atteindre le raccourci, il
devrait pouvoir influencer les roues pour obtenir des nombres qui lui permettent
de constuire une expression qui vaut deux). Le coach devrait donc
avoir le pouvoir de modifier l'environnement pour pouvoir créer
des bonnes conditions d'apprentissages.
Par contre, l'emploi du langage naturelle ne me semble pas un inconvénient
dans ce dispositif. En effet, comme le domaine est très restreint
et que le coach n'intervient qu'épisodiquement en cas de
besoin, il me semble plus facile pour l'ordinateur de générer
un discours bien adapté. C'est un avantages de l'enseignement des
mathématiques et en particulier de ce jeu. L'ordinateur n'as pas
besoin d'une quantité très grande de phrases. Elles sont
certainemnt basées plus ou moins sur le même modèle.
Par contre, en cas de grande difficulté de l'élève
et si ce dernier pose des questions plus générales à
son tuteur, je me demande ce qui se passe...
Un dispositif comme celui-ci est motivant pour l'élève
: mieux vaut faire de l'algèbre sous la forme d'un jeu intelligent
que de faire toute une série d'exercices. Rapidement, l'élève
comprend que s'il veut gagner, il doit maîtriser les expressions
algébriques. D'ailleurs, non seulement ce dispositif fait travailler
les différents opérateurs mais il permet également
d'apprendre certaines règles d'algèbre : un diviseur ne peut
pas être égale à zéro, il faut effectuer en
premier les parenthèses, zéro est l'élément
neutre de l'addition et 1 pour la mutplication,etc.
D'après des études qui ont été faites par
Burton et Brown, les élèves ont trouvés beaucoup plus
intéressant de travailler avec un coach que de faire le jeu entre
eux et les élèves "coachés" ont employé
une plus grande quantité d'expresisons différentes que les
autres.
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Bibliographie
[1] Mendelsohn P., Dillenbourg P. - (1991) Le développement
de l'enseignement intelligemment assisté par ordinateur, Conférence
donnée à la réunion de l'Association de Psychologie
Scientifique de Langue Française, Symposium Intelligence Naturelle
et Intelligence Artificielle
[2] Wengers, E. - (1987) Artificial Intelligence and tutoring systems,
Los Altos CA : Morgan Kaufmann
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Diana Balzan Dietrich, 18.04.98